vendredi 29 janvier 2016

Elle est longue la nuit qui a éteint ma terre
Je n'ai pas souvenir de la lointaine aurore
Qui a posé mon jour en éveillant mon corps
Sur ces arbres d'acier, ces collines de verre;

Noirceur muette et maquillée de brume.

Des chants qui s'élèvent de gosiers millénaires
Aux bords de feux de bois qui crépitent et qui crient
Les accents de la langue que parlaient mes pères
Et que par miracle je parle aussi;

Fredons muets et maquillés de brume.

Mais l'aurore viendra, car nous vivons toujours
Il reviendra notre astre avec ses rayons d'or
Pour faire briller enfin les charmes du jour
Dans l'immense beauté de notre pays du Nord;

Espoirs muets et maquillés de brume.

vendredi 18 décembre 2015

La France
Guillaume Apollinaire

Poète honore-là
Souci de la Beauté non souci de la Gloire
Mais la Perfection n’est-ce pas la Victoire
Ô poètes des temps à venir ô chanteurs
Je chante la beauté de toutes nos douleurs
J’en ai saisi des traits mais vous saurez bien mieux
Donner un sens sublime aux gestes glorieux
Et fixer la grandeur de ces trépas pieux
L’un qui détend son corps en jetant des grenades
L’autre ardent à tirer nourrit les fusillades
L’autre les bras ballants porte des seaux de vin
Et le prêtre-soldat dit le secret divin

J’interprète pour tous la douceur des trois notes
Que lance un loriot canon quand tu sanglotes

Qui donc saura jamais que de fois j’ai pleuré
Ma génération sur ton trépas sacré

Prends mes vers ô ma France Avenir Multitude
Chantez ce que je chante un chant pur le prélude
Des chants sacrés que la beauté de notre temps
Saura vous inspirer plus purs plus éclatants
Que ceux que je m’efforce à moduler ce soir
En l’honneur de l’Honneur la beauté du Devoir

17 décembre 1915

Guillaume Apollinaire


C'est fortement influencé par le symbolisme de Beaudelaire dans sa jeunesse, qu'Apollinaire élabora le concept du surréalisme, révolution culturelle et artistique du XXe siècle, usant de toutes les forces psychiques (le rêve, l'automatisme tout comme l'inconscient) libérées du contrôle de la raison et excluant toute préoccupation esthétique ou morale. Sa théorie trouve son essence dans un simple principe: créer se doit de provenir de l'intuition pour s'apparenter au maximum avec la vie et sa nature et échapper aux contraintes de la logique, laissant alors s'exprimer la voix de la pensée inconsciente. Un désir ardent de révolution, qui se traduira par de sérieuses mises en question de toutes les conventions et contraintes idéologiques, esthétiques et politiques (se rapprochant de l'anarchisme) donnera alors naissance à un mouvement d'idées parallèles: le dadaïsme. C'est à son retour du front de Champagne, après une tournure assez déplorable des événements pour l'armée française, qu'Apollinaire écrivit «La France», poème dont il incarne le narrateur. Il semble s'adresser à ses intellectuels contemporains, puis à ceux qui lui succédront, originaires ou, du moins, comme lui, simplement amoureux de la République tricolore, avant de se tourner vers l'État, la nation, elle-même, pour lui réciter ces derniers vers. La beauté d'une France étrillée par une bataille qui lui ayant coûté 25 000 morts et presque 100 000 blessés sur son propre territoire; l'honneur de ces hommes que la violence fit victime et celui d'un peuple persistant, semblent constituer les thématiques fondatrices du poème. On y appuie un principe de gloire, non pas par la victoire militaire, mais par la beauté du devoir, et le charme d'une nation unie, une gloire que saurons embellir les regards des générations futures. Il encourage d'ailleurs ses compagnons intellectuels à défendre ce principe, dans l'optique d'une lutte collective pour le regain de l'espoir, et ce, malgré la souffrance. La guerre, de ses atrocités et de ses contradictions, se voit également abordée sous un second plan, principalement utilisée comme un flux d'essence sur ces cœurs éteints; un désir d'éveiller l'espoir collectif. Un ton admiratif, patriotique et fier est conservé à travers l'entièreté du poème, donnant vie à un discours enflammé, celui du rêve et du regret d'un homme amoureux de sa patrie.

Pas une seule forme de ponctuation n'est utilisée à travers le poème, il semble avoir été rédigé en un seul souffle, comme enflammé par ses propos. L'utilisation d'une anaphore ici «L’autre ardent à tirer nourrit les fusillades. L’autre les bras ballants porte des seaux de vin» contribue à l'instauration d'un certain rythme malgré l'irrégularité des vers. Les rimes plates contribuent aussi à l'établissement d'une structure, celles-ci évoluant dans la plupart des cas, en regroupement de distiques. La séparation de «La France» est assez particulière; entâmée par un douzain, elle est suivie de deux distiques et d'un sizain. Sa lecture est également marqué de nombreuses exclamations «ô» rythmant le discours poétique.

«La France» prend vie dans une situation de guerre, sa localisation clairement citée dans le titre de l'œuvre. On y retrouve un narrateur boulversé par les atrocités de la guerre pour qui l'abandon n'est pas une option. Le devoir et la beauté de l'honneur semblent encadrer ses valeurs morales en un souffle d'espoir, celui d'un meilleur avenir. La mention d'un «loriot canon» nous indique qu'il ne s'agit pas d'un conflit actuel et se voit confirmée par l'ajout d'une date dans la présentation du poème (décembre 1915). La figure de style la plus parituclière et probablement la plus caractéristique du surréalisme serait certainement la suivante: « Chantez ce que je chante un chant pur le prélude». On y retrouve cette association particulière de mots de la même famille, formant à la fois une répétition, puis une allitération en «ch» pour en «p», en «u» et «r». «Que lance un loriot canon quand tu sanglotes». Il s'agit ici à la fois d'une personnification indirecte (puisque l'on apprend à la fin du texte que celle qui verse des larmes est en réalité la France) et un oxymore, associant l'idée d'un doux chant d'oiseau au tonnerre des canons.

Bref, pour ce désir de changement presque révolutionnaire, ce rêve décousu mais passionné, cette liberté dans sa rédaction et ces figures de style poignantes, il m'apparaît claire que «La France» est un poème surréaliste. «La poésie, c'est ce qu'on rêve, ce qu'on imagine, ce qu'on désire et ce qui arrive, souvent», disait Jacques Préverst illustrant alors la force qu'accorde la poésie au rêveur.

jeudi 17 décembre 2015

Euphrosyne

Ah ! ce n’est point à moi qu’on s’occupe de plaire.
Ma soeur plus tôt que moi dut le jour à ma mère.
Si quelques beaux bergers apportent une fleur,
Je sais qu’en me l’offrant ils regardent ma soeur;
S’ils vantent les attraits dont brille mon visage,
Ils disent à ma soeur: «C’est ta vivante image»
Ah ! pourquoi n’ai-je encore vu que douze moissons?
Nul amant ne me flatte en ses douces chansons;
Nul ne dit qu’il mourra si je suis infidèle.
Mais j’attends. L’âge vient. Je sais que je suis belle.
Je sais qu’on ne voit point d’attraits plus désirés
Qu’un visage arrondi, de longs cheveux dorés,
Dans une bouche étroite un double rang d’ivoire,
Et sur de beaux yeux bleus une paupière noire.

André Chénier, Poésies Antiques

Analyse

C'est aux premières lueurs du XIXème siècle que la littérature française connut une rupture avec la tradition nationale désignant alors par «romantiques» les écrivains affranchis des règles de pensée classique élaborées par les philosophes des Lumières et prônant le concept de génie artistique, irrationnel et créatif, non plus discipliné par la raison. Parmi ces exemptés gisait André Chénier qui, fidèle aux principes de son mouvement, célébrait la force irrépressible du sentiment, le culte de l'individualité et le grand mythe de la nature, animé d'une liberté intérieure prêtant l'oreille à l'inspiration divine et à l'instinct passionnel sans tout de même renoncer à l'intérêt qu'avait le classicisme pour les œuvres de l'Antiquité. C'est d'ailleurs de son œuvre «Poésies Antiques» que fut tiré «Euphrosyne», texte qu'abordera cette présente analyse. Euphrosyne est, selon la mythologie grecque, l'une des trois Charites, déesses personnifiant la vie par la séduction, la beauté, la nature et la créativité humaine, et plus spécifiquement celle de la joie et de la jubilation. Elle semble incarner le narrateur dans ce poème éponyme, bien que sa voix puisse être assimilée à celle de n'importe quelle jeune fille cherchant désespérément l'ombre d'un amant. On peut le déduire par sa référence à la beauté de sa sœur accaparant le regard de tous les hommes; ici Aglaé, représentation de l'éclat, la parure, la splendeur. Euphrosyne semble s'adresser directement au lecteur, ou peut-être à elle-même, sa narration à la première personne projetant une certaine impression de lamentation. En effet, bien que le thème de la beauté soit clairement traité, la tonalité relativement pathétique sur laquelle la jeune déesse exprime son mal de vivre, sa solitude et sa jalousie constitue également une partie intégrante de l'œuvre, vite remplacée, cependant, par l'espoir et la joie de vivre que l'on reconnaît à la jeune divinité. La nature, bien que mentionnée et utilisée à quelques reprises dans la construction d'images analogiques (fleur, moissons) occupe tout de même le second plan thématique ici. Il semble que, tout comme Ronsard, dans ce fameux poème où il invite le lecteur à «cueillir dès aujourd'hui les roses de la vie», Chénier prône par les vers d'«Euphrosyne» le principe du «carpe diem» (oui j'ai beaucoup apprécié la Société des poètes disparus) où profiter de chaque instant semble constituer la nature du message transmis. Il était bien connu que Chénier vivait selon ces principes; on raconte qu'il aurait même pris soin de corner la page du roman de Sophocle qu'il avait entâmé, et ce, dans les quelques secondes précédant son exécution publique.

Il est clair qu'«Euphrosyne» suit un rythme très évocateur digne du lyrisme romantique lui-même issu de la poésie grecque dont l'influence s'est montrée très importante sur l'écriture de Chénier. La ponctuation y est très présente, qu'elle agisse comme indicatrice d'une coupe ( . / ; / , ) suivant une majorité des accents rythmiques et marquant généralement la fin d'un vers ou comme amplification d'une émotion exprimée (! / ?). Il arrive à plusieurs reprises qu'un vers équivale à une phrase complète, mais l'utilisation d'enjambements externes se manifeste également, en particulier lors des 4 derniers vers. Or, le rythme n'en reste pas moins régulier et fluide (il s'agit d'un quatorzain unique entièrement constitué d'alexandrins). Les rimes sont plates, regroupées en distiques et contribue à une harmonie imitative dans l'ensemble du poème. La strophe se divise en deux parties égales de 7 vers marqués par une exclamation «Ah!». Plusieurs anaphores parsèment également le quatorzain: «Nul amant ne me flatte en ses douces chansons; Nul ne dit qu’il mourra si je suis infidèle.»

Il semble qu'un choix judicieux des mots dans la construction d'«Euphrosyne» nous permette de lui accorder un sens d'atemporalité dans le but de conserver l'actualité du «carpe diem». Le champ lexical employé par Chénier suggère un environnement campagnard (fleur, berger, moisson, etc.) traduisant une certaine liberté. Le poème débute sur une note assez pessimiste, le ton de la jeune fille se traduisant par un premier euphémisme: «Ah! ce n’est point à moi qu’on s’occupe de plaire», pour ne pas dire que nul ne cherche à la séduire. Une seconde exclamation suivie d'une périphrase « Ah! pourquoi n’ai-je encore vu que douze moissons?» traduisant le jeune âge de la fillette. Finalement, une allégorie finement choisie: les Charites, symboles mêmes des plaisirs de l'existence humaine.

Bref, il m'apparaît clair qu'«Euphrosyne» est une représentation quasi-parfaite du mouvement romantique, qu'il s'agisse de sa mise en évidence du Moi souffrant et de l'individualité; de son expression des plus pures ou des plus indignes aspects de l'émotion humaine ou même de son rythme et de sa la musicalité aux claires tendances lyriques. Pour sa manière surprenante de se détacher de ses racines dramatiques et de faire rayonner l'espoir dans un cœur qui, quelques vers plus tôt, semblait rompu par la solitude, il m'apparaît évident que la poésie puisse détenir cette sage capacité de vision, celle «de savoir qu'il pleut quand il fait beau, et qu'il fait beau quand il pleut».

mardi 15 décembre 2015

Beauté mythique

Le bruissement des feuilles d'or se balançant doucement au grés du vent. Le ruisseau étincelant tel un diamant des plus pur descent lentement le jardin. De minuscules boutons de fleurs topaze et saphir se dressent fièrement, heureux de pouvoir grandir. La dame tend la main vers le fruit rouge, celui qui a fait sa cage. L'herbe émeraude glisse et chatouille ses pieds. Celle qui, magnifique, observe son royaume, attendant le retour du printemps. Lorsqu'elle retrouvera le plaisir de sentir le vent caresser son visage.

Au loin, broutant librement, un daim dont la toison reflète les reflets de la lune, est épié. Une dame l'observe silencieusement, scrutant les moindres mouvements de la bête. Dans ses cheveux, de fins reflets d'argent. Dans ses yeux, la férocité d'une guerrière. Les muscles de ses jambes saillent sous sa courte jupe à frange, prêts à se mettre en marche. Sa main posée sur l'arc d'or décidera de la vie ou de la mort.

Sa beauté inspire les poètes et sa fourberie fait les poèmes. Les cheveux de blé caresse sa douce peau blanche. Et ses lèvres de sang entrouverte laissent voir des perles dans sa bouche. Sa seule vue emballe les cœurs, mais son départ laisse désolation et destruction. En sa présence les horloges ralentissent, mais en son absence les aiguilles cessent de bouger figées par le froid qu'est le manque. Son délicieux poison nous ensorcelle, laissant derrière elle un sillage d'âmes en peine.

Analyse

Ce poème en prose est un poème symboliste, car il y a une importance accordée aux sensations et un des thèmes est la mythologie. De plus, le rythme du poème recherche la musicalité. Dans ce poème, nous pouvons observer trois personnages différents symbolisant chacun un aspect de la beauté. En effet, le poème lyrique nous expose trois déesses, soit Perséphone, Artémis ou Aphrodite. Le poème démontre les différentes façon de voir la beauté.

Le poème veut nous exposer différents façons de voir la beauté. La première étant la beauté de la nature. Celle-ci est expliquée par le mythe de Perséphone. La déesse aurait été piégée aux enfer par Hadès et devrait y rester désormais, car lors de son séjour, elle a consommé des pommes grenades. La déesse serait aux enfers seulement en hiver et reviendrait au printemps. «le fruit rouge, celui qui a fait sa cage» fait référence aux pommes grenades et «attendant le retour du printemps. Lorsqu'elle retrouvera le plaisir de sentir le vent caresser son visage.» fait référence au fait qu'elle reviendra sur terre au printemps. De plus, chaque couleur est exprimée avec des pierres précieuses, car elles aurait un jardin fait de pierres précieuses aux enfers. La comparaison «Le ruisseau étincelant tel un diamant des plus pur descent lentement le jardin» en est un exemple. La deuxième partie parle de la beauté de la force en utilisant la déesse Artémis. «un daim dont la toison reflète les reflets de la lune» est une métaphore comme quoi Artémis serait la lune épiant le daim. Ensuite, la troisième partie du poème nous montre la beauté trompeuse de l'amour en utilisant la déesse Aphrodite. L'oxymore «Son délicieux poison nous ensorcelle» démontre que l'amour est délicieux, mais peut être très destructeur.

Le poème garde un certain rythme même s'il est en prose. Premièrement, l'alliteration en «s» «Le bruissement des feuilles d'or se balançant doucement au grés du vent.» nous démontre la douceur et la beauté du jardin de Perséphone. De plus, les phrases sont plus longues pour démontrer l'attente de la déesse du printemps. Deuxièmement, l'alliteration en «r» «Sa main posée sur l'arc d'or décidera de la vie ou de la mort.» nous démontre la férocité d'Artémis et sa force qui fait sa beauté. Déesse de la lune et de la chasse, le parallélisme « Dans ses cheveux, de fins reflets d'argent. Aussi, les phrases sont plus courtes pour démontrer la force. Dans ses yeux, la férocité d'une guerrière.» y fait référence. Troisièmement, le parallélisme «Sa beauté inspire les poètes et sa fourberie fait les poèmes» nous démontre que malgré la beauté de l'amour, il finira par nous d'étruire.

Finalement, le poème est un poème symboliste, car il est écrit en prose et a un rythme et une musicalité. De plus, le theme secondaire serait la mythologie, un thème exploité par les poètes symbolistes. Le poème nous parle des différentes faon de voir l'amour que ce soit par la nature, la force ou l'amour. La citation de Valéry «la poésie est le langage dans le langage» décrit bien le poème les mots nous permettent de voir un sens derrière les phrases

Jeanne Vermette
Les miracles
Elena Mandolini

Toi qui te prétends jeune et jolie,
Comment oses-tu te comparer,
À ce que la nature devant toi épanouit?
As-tu déjà tenté de comprendre les miracles de l'été?

N'as tu jamais admiré l'élégance de la rose?
Ou la clarté du ruisseau qui coule en chantant?
La riche terre sous tes pieds n'a que faire de ces choses,
Qui cachent aux yeux des autres les caprices du temps. 

La pluie qui pleure en délicates larmes sur les fleurs.
Le vent qui souffle et fait onduler le blé,
Plus blond encore que tes cheveux dorés.

Les érables qui s'embrasent avant la torpeur.
Vénus ne se révèle pas dans les yeux des jeunes filles,
C'est sous le ciel que la beauté fourmille.


Analyse

Les miracles est un poème du style de l'époque de la pléiade, à cause de son theme récurant de beauté, ses références à la mythologie romaine et du lyrisme. Il parle de la beauté qui se trouve là où on ne penserait pas la trouver, à savoir dans les plus petits détails de la nature. Le poème parle aussi des traces que le temps laisse sur une personne et de son incapacité à les effacer. 

Ce poème prend la forme d'un sonnet en vers libres aux rimes croisées dans les quatrains, puis suivies dans les deux tercets. Il y a beaucoup de personnifications dans le poème pour humaniser la nature pour faire rivaliser sa beauté avec celle d'une jeune femme. On y trouve aussi des métaphores (les érables en feu), ou encore des périphrases (la torpeur, pour désigner l'hiver). On y retrouve une allitération en «eur». La ponctuation est très importante et on note des inversions, ces deux éléments servant à donner du rythme au poème. 

Dans ce poème, les quatre éléments sont intégrés. La terre (la riche terre sous tes pieds), l'eau (le ruisseau qui coule), l'air (le vent) et le feu (les érables en feu). Ce poème parlé aussi des quatre saisons. Le printemps avec ses fleurs, l'été avec ses blés murs, l'automne avec ses arbres colorés et l'hiver, la torpeur. Plusieurs métaphores sont utilisées pour décrire ces éléments. Enfin, le poème fait référence à Vénus, déesse romaine de la beauté.

Enfin, Les miracles est conformé au style de la pléiade par ses thèmes. «La poésie, on ne sait pas ce que c'est, mais on la reconnaît quand on la rencontre.» disait Jean l'Anselme. En effet, on ne peut pas voir toute la beauté de la nature en un seul coup d'œil, mais quand on observe bien, on découvre tous les miracles de la vie. 

Vénus
Victor Hugo

Ciel ! un fourmillement emplit l’espace noir,
On entend l’invisible errer et se mouvoir ;
Près de l’homme endormi tout vit dans les ténèbres.
Le crépuscule, plein de figures funèbres,
Soupire ; au fond des bois le daim passe en rêvant ;
A quelque être ignoré qui flotte dans le vent
La pervenche murmure à voix basse : je t’aime !
La clochette bourdonne auprès du chrysanthème
Et lui dit : paysan, qu’as-tu donc à dormir ?
Toute la plaine semble adorer et frémir ;
L’élégant peuplier vers le saule difforme
S’incline ; le buisson caresse l’antre ; l’orme
Au sarment frissonnant tend ses bras convulsifs ;
Les nymphaeas, pour plaire aux nénuphars pensifs,
Dressent hors du flot noir leurs blanches silhouettes ;
Et voici que partout, pêle-mêle, muettes,
S’éveillent, au milieu des joncs et des roseaux,
Regardant leur front pâle au bleu miroir des eaux,
Courbant leur tige, ouvrant leurs yeux, penchant leurs urnes,
Les roses des étangs, ces coquettes nocturnes ;
Des fleurs déesses font des lueurs dans la nuit,
Et, dans les prés, dans l’herbe où rampe un faible bruit,
Dans l’eau, dans la ruine informe et décrépite,
Tout un monde charmant et sinistre palpite.
C’est que là-haut, au fond du ciel mystérieux,
Dans le soir, vaguement splendide et glorieux,
Vénus rayonne, pure, ineffable et sacrée,
Et, vision, remplit d’amour l’ombre effarée.


Analyse

Vénus est un poème écrit par Victor Hugo, un auteur romantique. Dans ce poème, l'auteur décrit la beauté paisible de la nature. Les animaux et les plantes du boisé où se déroule le poème se réveillent pour adorer Vénus, la déesse de la beauté, qui se révèle à eux sous la forme de la planète Vénus.

Le poème comporte une seule strophe en alexandrins. La ponctuation est très importante dans ce poème. À la fin de chaque vers, on retrouve un signe de ponctuation pour indiquer l'intonation du poème. Le poème et rempli de personnifications, ce qui a pour but de rendre humain les plantes et les animaux qui vont adorer leur déesse. Le rythme du poème est régulier grâce aux alexandrins. Habituellement, dans un poème romantique, on devrait retrouver le pronom «je», mais il n'y en a pas dans ce poème. Le poème comporté des rimes suivies.

Ce poème s'inspire de la mythologie romaine. Vénus est la déesse de la beauté. Ce poème se déroule pendant là nuit (un fourmillement empli l'espace noir). Aussi, la planète Vénus est visible dans le ciel étoilé (C’est que là-haut, au fond du ciel mystérieux,-Dans le soir, vaguement splendide et glorieux,-Vénus rayonne, pure, ineffable et sacrée). Si non, en terme de date, ce poème pourrait se passer n'importe quand.

Ces poème ne se conforme pas vraiment au style du romantisme. La période romantique est marquée par l'utilisation du «je». Toutefois, le poème est d'un grand lyrisme, ce qui est fidèle au courant littéraire. Comme dirait Louis Zukofsky:«La poésie, c'est cela. Soudain, on voit quelque chose». Cette citation représente bien le poème de Victor Hugo, car la nature dans ce poème attend la manifestation de la déesse et soudain, elle apparaît. 

L’immortelle blanche
Pierre Corneille

Donnez-moi vos couleurs, tulipes, anémones ;
Œillets, roses, jasmins, donnez-moi vos odeurs ;
Des contraires saisons le froid ni les ardeurs
Ne respectent que les couronnes
Que l’on compose de mes fleurs :
Ne vous vantez donc point d’être aimables ni belles ;
On ne peut nommer beau ce qu’efface le temps :
Pour couronner les beautés éternelles,
Et pour rendre leurs yeux contents,
Il ne faut point être mortelles,
Si vous voulez affranchir du trépas
Vos brillants, mais frêles appas,
Souffrez que j’en sois embellie,
Et, si je leur fais part de mon éternité,
Je les rendrai pareils aux appas de Julie,
Et dignes de parer sa divine beauté.


Analyse

L'immortelle blanche est un poème écrit par Pierre Corneille, poète de l'époque baroque. Le theme principal de ce poème est la beauté et la perte de cette beauté avec l'âge et le temps. Dans ce poème, Corneille veut expliquer qu'avec le temps, toute belle chose devient laide, du moins perd de sa beauté d'origine, mais que seule une déesse peut se vanter d'être éternellement belle.

En ce qui concerne la structure du texte, elle est respectueuse du style de l'époque baroque. En effet, on trouve plusieurs figures de style dans le texte. Par exemple, on y retrouve des personnifications (ce beau qu'efface le temps) et des métaphores pour parler des bijoux (vos brillants, mais frêles appâts). Le poème comporté des rimes, mais elles ne sont pas organisées selon une structure prédéfinie (rimes embrassées, croisées...). On utilise l'image d'une fleur pour représenter la beauté. Avec le temps, la fleur se fane, tout comme la beauté d'une femme. Même si le poème n'a pas un nombre de pieds fixe, on retrouve un certain rythme dans le texte.

Le poème pourrait se dérouler n'importe quand. On y ressent une progression, car le temps passe dans ce poème. En parlant des fleurs, l'auteur parle d'une femme, qui grandit, s'épanouit, puis se fane et meurt. L'auteur dit que, même si les femmes se maquillent et se mettent des bijoux, leur beauté ne pourra jamais égaler celle d'une déesse, qui, elle, est immortelle. 

On peut dire que Corneille se conforme au style de poésie de l'époque, car le texte est rempli de figures de style et a un rythme et une musicalité. Ce sont des éléments tres présents dans la poésie baroque. Finalement, comme le disait si bien Jean-Pierre Depétris: «La poésie c'est voir avec les oreilles». Il suffit d'écouter ce poème pour voir les images que le poète voulait nous montrer à travers son poème.